Étiquettes

, , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , ,


Vous aimez les romans historiques ?

Du même auteur, lisez Les Capuchonnés du Puy !
► en livre de poche
Amazon
Fnac
Cultura
Decitre
– … ou commandez-le en librairie
  —(Hachette Livre. ISBN : 979-10-359-2688-5)
► au format ebook
Amazon
Fnac


Je ne vais apprendre à personne que le blues est à la racine de toute la musique rock contemporaine ; au point de s’y fondre et de se confondre parfois. Mais comme il ne saurait exister d’apprentissage approfondi de la guitare sans la connaissance des maîtres qui ont fait l’histoire de la guitare blues, il m’a semblé judicieux de rafraîchir les mémoires. Si une bonne partie des guitaristes listés ici sont certainement connus de vous, vous n’en découvrirez pas moins, j’en suis sûr, des noms que vous ignorez encore. L’occasion pour vous d’enrichir votre discothèque et votre culture guitaristique.

Car le blues, c’est très simple et très complexe à la fois. Douze mesures, trois ou quatre accords, un rythme à quatre temps, a priori, pas de quoi affoler Xenakis ou Boulez, vous me l’accorderez… Et pourtant !

Ici, nous avons voulu rester proches de notre sujet, à savoir le « vrai » blues, ce qui impliquait d’exclure certains grands du rock, mais sans oublier ceux qui ont montré une vraie compétence technique en la matière, ceux qui ont marqué l’histoire centenaire du blues, voire ceux dont l’influence future se montra réelle et durable.

Il est généralement accepté que le blues, à la guitare tout au moins, a une date de naissance : celle du titre St-Louis Blues, en 1914, interprété par WC Handy. Le plus curieux de l’histoire, c’est que Handy lui-même affirme qu’il n’a rien inventé du tout mais qu’il s’est inspiré d’un guitariste black, aperçu par lui au fin fond du Mississippi en 1903, qui grattait sa guitare avec un vieux couteau rouillé en guise de bottleneck et chantait les champs de coton.

Ce fut dans les années 1920 que Charley Patton popularisa vraiment la guitare du Delta (du Mississippi, donc), notamment avec la chanson Pony Blues, dans les bas fonds du sud américain, en compagnie de Son House et de Willie Brown.

Mais le blues ne se voulait pas seulement rural ; il était urbain également, ce que démontra la scène chicagoane avec Blind Lemon Jefferson notamment. Et même si aujourd’hui on ne fait plus trop la différence entre le blues des villes et le blues des champs, ils n’en ont pas moins forgé leur propre lignée. D’un côté, Robert Johnson qui mit en valeur jusqu’au milieu des années 1930, le country blues originel avant que Muddy Waters ou John Lee Hooker, quand ils quittèrent les rivages du Mississippi pour Detroit ou Chicago, le reprennent à leur compte. Et, d’un autre côté, les lignes mélodiques de Blind Lemon Jefferson qui sont reprises et perfectionnées par Lonnie Johnson à la Nouvelle-Orléans, et, un peu plus tard, par T-Bone Walker à Dallas qui allait décider un certain BB King à se mettre à la guitare…

1) Stevie Ray Vaughan
Si certains guitaristes ont le style, d’autres le feeling, d’autres encore la technique, Stevie Ray Vaughan, lui, avait tout ! Sans compter une présence scénique hors du commun qui font de ses vidéos de concert des moments d’anthologie. Comment vous dire sans passer pour un thuriféraire appointé… Stevie Ray, c’est l’esprit du blues revisité, c’est une leçon de guitare à chaque titre, c’est unique. Et si vous ne deviez écouter qu’un seul album, choisissez « Texas Flood », son premier enregistrement. De deux choses l’une : ou vous arrêtez définitivement de taquiner votre instrument favori, ou vous vous préparez des années de travail pour ne serait-ce qu’approcher le génie de Stevie Ray. Il aurait aujourd’hui 54 ans si un accident d’hélicoptère ne nous l’avait retiré et on n’ose imaginer ce que serait l’histoire de la guitare s’il avait pu poursuivre son chemin. Comme pour Hendrix, la communauté guitaristique ne s’en remettra jamais.

2) BB King
Si T-Bone Walker fut l’incontestable maître du blues pendant la première partie du XXe siècle, BB King s’arroge le titre pour ce qui concerne la seconde moitié. Un jeu tout en finesse, singulier (notamment avec ses bends à deux cordes, un vibrato de la main gauche incroyable…), une synthèse du blues authentique mise au service de la guitare électrique. Et sa carrière n’en fut pas moins éblouissante avec d’innombrables titres de gloire, émaillée d’incessantes tournées et de plus de cinquante albums ! Vous vous doutez bien que le King ne se raconte pas en quelques lignes ; sachez seulement que, sans lui et son phrasé unique, son style qui veut que chaque note soit pensée et où la frime est absente, nous ne connaîtrions pas Eric Clapton ou Jeff Beck, pour  n’en citer que deux… BB King demeure, aujourd’hui encore, d’une modernité rare tout en appliquant tous les canons du genre. Une évidence, en quelque sorte.

3) Robert Johnson
De nombreux grands ont illustré le blues, l’ont fait vivre et exister. Robert Johnson n’en fait pas partie car, lui, EST le blues incarné ! Technicien sublime de la guitare, il a su mêler le blues rural, le walking blues, le slide comme personne ! Avec même pas une trentaine de titres, il est resté, tout au long du XXe siècle, comme la référence ultime de tout ce que le monde rock a porté comme guitaristes (je n’ai pas la place de citer toutes les reprises que d’innombrables musiciens ont ajoutées à leur répertoire). Sa vie est mal connue (ce qui contribue à sa légende, comme il se doit) et sa mort, à l’âge de 27 ans, par empoisonnement à la strychnine d’un mari jaloux, n’a rien retiré à son immense influence. Pour l’anecdote, sachez que le coffret de deux CD réunissant toutes ses œuvres, sorti en 1990, s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires ! Pas mal pour un jeunot !

4) Eric Clapton
A l’image de Hendrix, mais en plus vivant, Clapton est inclassable tellement il surpasse tout son monde et seuls les ânes rencontrés par votre serviteur au fin fond de la Varenne Saint-Hilaire peuvent penser autrement… Clapton, dont le sobriquet est God (ou Slowhand, c’est selon), est l’incarnation du blues blanc. S’il commence avec les Yardbirds dès 1962, c’est pour les quitter dès qu’ils s’éloignent du pur esprit du blues… Quand il lâche John Mayall et ses Bluesbreakers, c’est que le jazz les a atteints… Quand il forme Cream, groupe rock s’il en est, il reprend Crossroads de Robert Johnson… Bref, je vous en ferais des pages et des pages sur le bonhomme dont je vous supplie de croire que ce n’est pas juste un technicien de la guitare, loin s’en faut ! Rejouer les notes de Clapton est à la portée de tous ; les interpréter avec le centième de l’esprit qui les anime est tout bonnement hors de portée (c’est le cas de le dire !) des humbles mortels que nous sommes. Ite missa est.

5) Muddy Waters
Avec plus de cinquante années de carrière, Muddy Waters a eu l’occasion d’arpenter tous les coins et les recoins du blues, de croiser sa guitare avec les plus grands, d’enregistrer les albums les plus formidables qu’il soit. Depuis Son House (sa première influence) jusqu’au blues urbain de Chicago, il survole tous les styles, jusqu’à être reconnu comme le père du blues blanc britannique ! D’ailleurs, son titre célébrissime Rolling Stone allait marquer des p’tits jeunes Anglais au point de créer un groupe éponyme… En clair, vous n’avez pas le droit de ne pas aimer Muddy Waters, vous n’avez pas le droit de ne pas l’écouter, l’étudier, le décortiquer… Celui que le référentiel magazine Rolling Stone (encore !) a placé 17e parmi les 100 plus grands artistes de tous les temps, n’en a pas fini avec nous, même s’il nous a quittés en 1983. Si vous ne le connaissez pas encore, vous découvrirez les innombrables titres qu’il a créés et qui ont été repris par les plus grands (sans forcément le citer, d’ailleurs) ; vous y retrouverez tout ce qui fait l’essence du blues et, par conséquent, du rock.

6) Peter Green
Si c’est la frime et la démonstration technique que vous recherchez, passez votre chemin ! En revanche, si la mélodie, l’harmonie du blues blanc vous passionnent, vous allez être gâté ! Peter Green, dont BB King disait « Il a le son le plus soyeux que je connaisse et c’est le seul guitariste qui me donne des sueurs froides ! », est un musicien hors pair. Au début de sa carrière, il remplace Clapton au sein des Bluesbreackers de John Mayall puis crée le groupe mythique Fleetwood Mac pour lequel il créera des titres mythiques : Oh Well, Man of the World, Albatross, pour n’en citer que quelques-uns. Pour l’anecdote, sachez qu’en 1969, Fleetwood Mac vendra plus d’albums que les Beatles et les Stones réunis !!! A noter, au passage, qu’il est, notamment, le créateur de Black Magic Woman si magnifiquement repris par Santana… Et ne négligez pas pour autant ses albums avec le Splinter group, du blues garanti pur roots.

7) Hubert Sumlin
Si vous désirez sortir des sentiers bluesy battus et rebattus avec leurs incontournables gammes pentatoniques, écoutez Sumlin, vous n’en croirez pas vos oreilles ! Guitariste attitré, et indissociable, de Howling Wolf, il mélange blues du Sud, blues urbain chicagoan et musique de Memphis pour une incroyable fusion qui a créé les lettres de noblesse de ce qu’on appelle aujourd’hui le rock. Les plus grands le citent comme influence majeure sinon première : Eric Clapton, Keith Richards (les Stones l’inviteront à leur concert, en 2003, au Madison Square Garden !), Jimmy Page, Bob Dylan, Frank Zappa, Jeff Beck, Carlos Santana… N’insistons pas : si vous ne connaissez pas encore Hubert Sumlin, vous êtes pardonné ; mais si vous ne vous précipitez pas pour l’écouter, vous êtes impardonnable ! Et je vous recommande plus particulièrement :  Built For Comfort, Shake For Me, 300 Pounds of Joy, Louise, Goin’ Down Slow, Killing Floor ou Wang Dang Doodle.

8) Jimi Hendrix
Eh oui, le plus grand guitariste électrique de tous les temps a également sa place dans le top 50 des bluesmen ! Car on peut légitimement penser que s’il avait consacré sa carrière uniquement au blues, il en serait devenu le maître incontestable (c’est pour cette raison qu’il ne figure ici qu’en huitième position car sinon, dans les charts des plus grands guitaristes, il serait forcément en tête !). Certes, ses innombrables expérimentations à l’électrique ont quelque peu noyé le poisson ; mais avec Hendrix tout commence et tout finit par le blues ! Tenez, au hasard, jetez donc une oreille attentive à Catfish Blues ou à Driving South, ou encore à Red House parmi bien d’autres ; si ça, ce n’est pas du blues pur jus ! Hendrix, c’est tellement énorme qu’on ne trouve plus ses mots ! On se contentera donc d’écouter ses notes…

9) Albert King
De son vrai nom Albert Nelson (un patronyme qu’il changea rapidement, en hommage à BB King), il est né au fin fond du Mississippi, dans les plantations de coton ; ce qui n’est pas bien original pour un bluesman, vous me l’accorderez… Ce qui l’est davantage, en revanche, c’est que, gaucher, il jouait avec une guitare droitier sans en inverser les cordes ; n’hésitant pas, par ailleurs, à adopter des open tunings invraisemblables (en Do, par exemple) qui lui permettaient des tirés de cordes non moins incroyables ! En tout cas, toutes ces singularités lui confèrent un son, un toucher, absolument uniques. Clapton, Hendrix, Mike Bloomfield, Stevie Ray Vaughan lui ont emprunté bien des lignes de solo, montrant ainsi toute l’influence d’Albert King dans le blues électrique, bien qu’il n’ait pas eu l’heur de connaître une carrière époustouflante. A noter, parmi son importante discographie, sa participation à l’album « Still Got The Blues » de Gary Moore.

10) Buddy Guy
Grand amateur de pois blancs (Dieu seul sait pourquoi), Buddy Guy en flanquait  partout ! Sur sa guitare, sur sa pédale wah-wah, sur ses chemises… Nonobstant cela, il est un des pères de la fusion blues-rock (pas moins de cinq Grammy awards à son actif, tout de même !), n’hésitant pas à faire le show sur scène (utilisant des baguettes de batterie pour jouer sur sa gratte !), reconnu comme l’une des inspirations majeures de Hendrix, Page, Beck et de Clapton. Buddy Guy est né en Louisiane, mais c’est comme bluesman chicagoan urbain qu’il connaîtra la gloire. Ses solos à l’électrique restent, aujourd’hui encore, impressionnants même s’il s’exprime avec la même fougue sur une acoustique (ce qu’on lui reconnaît moins pour des raisons obscures). Certes, il est un peu oublié de nos jours même si Fender lui a consacré un modèle Signature ; et pourtant, amateur de blues ou de rock , vous ne sauriez passer à côté.

11) T-Bone Walker
Rares sont les bluesmen qui ont su embrasser, avec autant de talent, tous les aspects du genre, même si T-Bone Walker est issu du Texas et fut fortement inspiré par Blind Lemon Jefferson : du blues rural à la musique urbaine, de la soul au jazz, pratiquement aucun style n’a échappé à son esprit de fusion qu’il exploitait comme personne. Et surtout, ce n’est pas là le moindre de ses titres de gloire, il est le vrai inventeur du solo à la guitare électrique, influençant des générations de guitaristes ! Grand camarade de Charlie Christian (une autre sacrée pointure, celui-là, mais dans le jazz), T-Bone Walker savait faire le show en jouant sa Gibson ES-250 derrière la tête ou en se lançant dans de longues improvisations. BB King lui-même reconnaît son influence majeure dans son jeu ! En fait, tous les guitaristes du monde, du moment qu’ils entament un chorus sur une guitare électrique, doivent quelque chose à T-Bone. Un grand maître s’il en est…

12) Albert Collins
Plus connu sous le sobriquet de « Iceman », Albert Collins est un des nombreux fruits bluesy produits par le Texas ; mais sa technique de jeu, le son qu’il prodiguait, en font un phénomène à part. Inspiré  par John Lee Hooker et Clarence Gatemouth Brown, il est par ailleurs le cousin de Lightning Hopkins, un autre grand de la guitare. Inséparable de sa Telecaster, il bénéficia lui aussi du revival blues des années 1960, régalant des foules entières de son jeu sur scène (encore un qui utilisait un câble jack de 30 mètres de long pour aller et venir à son aise) mais aussi par une technique guitaristique maîtrisée à l’extrême ; avec l’usage d’un capo et des open tunings en veux-tu en-voilà, sans parler de ses notes aiguës qu’il tenait à pleine puissance. Un versant du blues urbain qu’aucun amateur ne saurait ignorer.

13) Freddie King
Avec Freddie King, on fait dans le lourd, dans tous les sens du terme (ce mec était aussi immense que balèze !) : pur produit du blues urbain, et chicagoan en l’occurrence, et bien qu’il soit né (et mort) au Texas, il a influencé des myriades de guitaristes dont Eric Clapton n’est pas le moindre. Que ce soit par son jeu, puissant, avec des attaques de main droite prodigieuses et des gammes pentatoniques à n’en plus finir, ou par son chant, King a survolé le blues revival des années 1960. Et si une mort prématurée, à l’âge de 43 ans ne l’avait emporté, on peut légitimement se demander s’il ne serait pas devenu plus grand encore. D’un point de vue guitaristique, je ne saurais trop vous recommander d’éplucher son jeu, si simple en apparence, si complexe en réalité. Un des trois grands King, avec BB et Albert.

14) Jeff Beck
Difficile de comprendre la présence de ces guitaristes étiquetés « rock » et parfois même « gros rock » sans savoir que le blues blanc, pendant naturel et évolutif du blues noir américain, et plus particulièrement le blues britannique, sont constitutifs du genre. Proclamer que le rock sans le blues n’existerait pas est une chose ; l’appréhender et le pénétrer en est une autre. Et Jeff Beck en est la démonstration, bien que souvent cantonné dans l’ombre d’Eric Clapton, grâce à une inspiration, une technique de jeu, absolument ébouriffantes. Il ne se veut pas guitariste mais fusion de tous les styles de musique et sa carrière, désordonnée et faite de curiosités artistiques, en a perdu plus d’un en chemin. Mais l’esprit du blues blanc, lui, y a gagné. Indubitablement.

15) Otis Rush
Bien qu’il soit né au Mississippi, Otis Rush est un pur produit du blues électrique de Chicago, largement inspiré de Muddy Waters et de Howling Wolf. Gaucher, il jouait avec une guitare de droitier sans même se donner la peine d’inverser les cordes. Ce qui lui donne un son, un toucher, hors du commun ; favorisant un jeu lent et profond, avec des notes tirées à l’extrême, des arpèges plutôt jazzy. Une influence majeure, et reconnue, de Peter Green, d’Eric Clapton, de Led Zeppelin ou de Stevie Ray Vaughan (qui baptisa son groupe « Double Trouble » d’après un titre d’Otis Rush). Evidemment, interpréter les chansons de Rush n’est pas chose facile (d’autant qu’il était baryton !) car son style guitaristique en a désarçonné plus d’un. Mais vous tirerez forcément bénéfice de l’émotion formidable qui émane de son jeu ; ce qu’on appelle le « blues », je crois…

16) Elmore James
Grand innovateur, question technique instrumentale, Elmore James en a bluffé plus d’un : comment, avec un jeu aussi réduit, peut-on aussi bien incarner le blues ? Personnification de la fusion entre le blues du Mississippi, lourd et chargé d’histoire, et le blues urbain (de Saint-Louis, en premier lieu, puis de Chicago), il a développé une technique au bottleneck qui demeure, aujourd’hui encore, une des références du genre. Largement inspiré par Robert Johnson et par Sonny Boy Williamson, Elmore James fut un compositeur prolifique même s’il n’existe aucun enregistrement de sa première période (avant la Seconde Guerre mondiale), et la référence avouée de Ry Cooder et de Jimi Hendrix, ce dont peu de guitaristes peuvent se glorifier, vous l’admettrez.

17) Chuck Berry
Chuck Berry, c’est le chaînon manquant entre le blues et le rock n’ roll ; celui qui vous aidera à comprendre, le cas échéant, combien les deux styles sont liés et indissociables. Utilisant des tonalités invraisemblables (le titre « Johnny B. Goode » se joue en Si bémol !), Berry a su développer une technique qu’on pourrait juger simplette jusqu’à ce qu’on ait essayé ! La preuve, rares sont ceux qui ont su assimiler ses influences blues et sa technique de riffs imparables. Et Keith Richards, le champion du riff rock, reconnaît l’influence extraordinaire qu’a eue ce musicien sur sa technique de jeu. On pourrait en écrire des tartines sur ce personnage hors normes qui connut la prison, les plaintes pour dérives sexuelles, les poursuites en justice pour vol de droit d’auteur ; il n’en reste pas moins un créateur de chansons éternelles et un homme de scène prodigieux.

18) Jimmy Page
Vous vous doutez bien que je ne vais pas vous narrer la prolifique carrière de Jimmy Page en quelques lignes ! C’est impossible tant ses séances de studio pour les artistes les plus divers sont nombreuses, tant ses productions et compositions ont proliféré tout au long des années 1960, sans parler de la prodigieuse réussite du groupe Led Zeppelin…Une chose est certaine : le père du rock (et, accessoirement, le pionnier du hard rock) vient du blues ; par ses inspirateurs bien sûr (Hubert Sumlin, Freddie King, Otis Rush, Elmore James, BB King…) mais aussi par sa technique guitaristique qui fit merveille au sein des Yardbirds et du Zeppelin. Jimmy Page fait partie de cette génération de guitaristes aussi inspirés par le jeu en acoustique qu’en électrique, déployant encore et toujours des innovations renversantes sans jamais s’éloigner des fondamentaux bluesy. Une vraie leçon.

19) Son House
Mélange de sacré et de profane, Son House est un vrai bluesman du sud, rural, avec tout ce que la légende du genre implique : sa vie dans la plantation, sa vocation de pasteur prêchant les évangiles, le meurtre d’un homme lors d’une rixe alcoolisée, l’oubli pendant quelques décennies jusqu’à ce que le revival du folk blues des années 1960 le sorte de sa misère. Son House est certainement le père du walking blues et son jeu au slide, sur sa guitare à résonateur National, a influencé des générations de musiciens ; parce qu’il évoquait le blues noir américain comme personne, parce que ses textes, son jeu flamboyant à la guitare (qu’il ne commença pourtant qu’à 25 ans !) ne laissent personne indifférent. Et sûrement pas Muddy Waters ou Robert Johnson à qui il accorda quelques leçons de technique instrumentale. Et au-delà de son jeu, il faut voir dans Son House un concentré de blues du sud, une évocation intense de ce que pouvait être la vie des « Negroes » dans le delta du Mississippi. Un monstre sacré, donc.

20) Robbie Robertson
Décrit par Bob Dylan comme le « génie de la guitare mathématique », Robbie Robertson est toujours considéré aujourd’hui comme le plus grand guitariste de country blues vivant… C’est dire l’envergure du gaillard ! Pour vous le situer, sachez qu’il fut le membre éminent du groupe The Band (dont le film « The Last Waltz » présente le dernier concert), qu’il fut considéré comme le 78e meilleur guitariste de tous les temps, qu’il composa de nombreuses musiques de film (« Raging Bull », « The King of Comedy », « The Color of Money », « Gangs of New York »…). Mais que vient-il donc faire dans ce classement des plus grands guitaristes bluesmen, me direz-vous ? Eh bien, écoutez-le et vous constaterez combien une musique aussi roots peut s’enrichir indéfiniment par d’incroyables figures de styles, qu’elles soient harmoniques ou purement guitaristiques.

21) Guitar Slim
Orphelin, au fin fond de son Mississippi natal, Eddie Jones sue le burnous dans une plantation de cotton. Le week-end, il chante, danse, joue avec des groupes locaux et se fait remarquer en portant des costards rouge cerise improbables, des pompes blanches et des cheveux décolorés tout aussi invraisemblables. Showman extraordinaire, il devient une référence pour toute une génération. Ainsi Buddy Guy, qui affirmera : « Je voulais jouer comme B.B. King mais tenir la scène comme Guitar Slim ! ». Son plus grand succès, The Things That I Used To Do, voit Ray Charles l’accompagner au piano, et reste numéro un des charts pendant six semaines ! Un vrai bluesman, ce Guitar Slim, avec son enfance difficile, son penchant immodéré pour les femmes et la dive bouteille.. Qui le perdra puisqu’il mourra à l’âge de 32 ans, quelques jours avant l’accident fatal qui coûta la vie à Buddy Holly et à Richie Valens. Mauvaise année pour la musique…

22) Rory Gallagher
Encore un Irlandais qui a marqué de son empreinte l’histoire du blues blanc, accompagné de son incontournable Strat usée jusqu’à la corde (et qui ne comportait guère de pièces d’origine)… Avec plus de 30 millions d’albums vendus, d’innombrables participations à des concerts ou à des enregistrements d’artistes tous plus célèbres les uns que les autres (Muddy Waters, Jerry Lee Lewis, Chris Barber, Albert King, Rolling Stones…), Rory Gallagher est un des rares à réussir l’impensable : détrôner Eric Clapton de son statut de meilleur guitariste de l’année (classement du Melody Maker britannique en 1972). Avec un style brillant, une technique blues absolument ahurissante, largement inspirés de ses maîtres (Leadbelly, Buddy Guy, Freddie King, Albert King, Muddy Waters, John Lee Hooker), Gallagher a su réunir, sur ses nombreux albums solos, tout ce qu’il vous faut savoir du blues électrique blanc.

23) Duane Allman
Pur produit de Nashville, Duane Allman décida de se mettre à la guitare après avoir entendu un concert de BB King, en 1969, aidé en cela par son frère Gregg, guitariste depuis peu. Les deux frères allaient connaître une (trop) brève carrière avec le Allman Brothers Band mais ce sont surtout les sessions en studio qui placèrent sous le feu des projecteurs Duane, remarqué notamment par Eric Clapton qui lui demanda de rejoindre son groupe. Mais Duane refusa, se contentant ( !) de participer à l’enregistrement du mythique album « Layla and Other Assorted Love Songs ». Au nombre des artistes auquel il a prêté son jeu inimitable à la guitare, on peut citer (et donc écouter !) : Wilson Pickett, Clarence Carter, King Curtis, Aretha Franklin, Otis Rush, Percy Sledge, Johnny Jenkins, Boz Scaggs, Delaney & Bonnie… Le roi de la guitare slide (avec un tube d’aspirine !) est mort dans un accident de moto à l’âge de 25 ans. Il n’existe que trois albums des frères Allman mais ils valent le détour !

24) Charley Patton
On parle toujours du blues du Delta, de sa sonorité singulière, mais on oublie bien trop souvent que cette musique a un géniteur : Charley Patton ! Et quand je vous aurais dit que Robert Johnson, Son House, Muddy Waters, Howling Wolf (entre autres) en sont les disciples, vous comprendrez l’importance de cette légende du blues. Décédé en 1934 à l’âge de 42 ans, Patton n’est pratiquement jamais sorti de son Mississippi natal, se produisant dans des bars et des plantations pour chanter de vieux blues, des chants hillbilly, des ballades noires américaines qu’il entonnait de sa voix puissante, accompagné de sa guitare. Et il faisait le show en plaçant sa gratte dans le dos, à plat sur ses genoux, bref tout ce qu’on est en droit d’attendre d’un vrai virtuose ! Pour l’anecdote, on ne sait toujours pas si Charley Patton était d’origine africaine, cherokee ou, plus simplement un métissage des deux. Ce qui ne change pas grand-chose à l’affaire si ça n’en boucherait pas un coin à quelques-uns d’apprendre que le père du blues du Delta était un Amérindien…


(Du même auteur : La Valise écossaise, un recueil de nouvelles.)
► en livre de poche
Amazon
► au format ebook
Amazon

 

 

 

 


25) Mike Bloomfield
Les jeunes générations imagineront mal qu’un guitariste blues blanc puisse dépasser Eric Clapton, dans cette catégorie ! Et pourtant, ce fut bien le cas de Mike Bloomfield, mort d’une overdose à l’âge de 38 ans. Bloomfield est non seulement un des guitar heroes du XXe siècle, il est aussi celui qui a remis en selle d’innombrables vieux bluesmen oubliés en leur proposant de venir jouer dans son club, à Chicago, Pick A Pickle ; au nombre desquels Big Joe Williams qui lui vouera, de ce fait, une reconnaissance éternelle. Vous pourrez écouter tout le talent de ce guitariste hors pair au sein du Paul Butterfield Band, dans l’album « Highway One Revisited » de Bob Dylan, sur le disque « Super Session »  en compagnie de Stephen Stills, ou sur ses nombreux albums solos. Mike Bloomfield demeure aujourd’hui encore une référence du blues électrique moderne avec, notamment, un titre de gloire rarement égalé : partager la scène, avec égalité de talent et de virtuosité, pour une jam session improvisée, avec Jimi Hendrix. Voilà qui devrait vous conduire à vous intéresser de plus près au personnage.

26) Gary Moore
A première vue, vous allez penser que l’honorable auteur de ces lignes est devenu fou puisque Gary Moore est une référence de la guitare rock, et non blues ! Et en plus, son berceau irlandais semble bien loin des rivages du Mississippi ! Que nenni, mes bons amis, c’est que vous n’avez pas fouillé suffisamment les bacs de votre disquaire préféré et que vous êtes passés à côté de ses somptueux enregistrements, essentiellement dans les années 1990, comme « Still Got The Blues » ou « Blues for Greeny ». Avec sa sonorité chaleureuse en diable sur sa Les Paul, Gary Moore a joué avec BB King, Albert Collins ou Albert King ; déjà une référence en soi, question blues… On est bien loin de ses débuts au sein du Thin Lizzy ! Chez Moore, tout est bon : le son, la technique, l’esprit, et il restera, sans conteste possible, comme l’un des rares et authentiques guitar heroes de ce siècle. Tout cela pour vous dire que dans son importante discographie, il vous faudra rechercher les perles bluesy, pourtant nombreuses, pour apprécier tout le jus de ce bluesman blanc et européen.

27) John Lee Hooker
Avec John Lee Hooker, on entre dans le panthéon des bluesmen électriques ! Né dans le Mississippi, il entre de plain-pied dans le monde du blues grâce, notamment, à son beau-père, musicien de son état, qui lui fit rencontrer Blind Lemon Jefferson, Blind Blake, Charlie Patton, excusez du peu. Adolescent, il se met à la guitare puis emménage à Memphis, à Knoxville, à Cincinnati, où il anime les bars et les cinémas locaux. Mais c’est en s’installant à Detroit que sa carrière démarre vraiment et qu’il produit ses premiers enregistrements. Retracer pas à pas sa vie en si peu de lignes est une gageure mais sachez qu’il bénéficia à plein du folk et blues revival des années 1960 notamment grâce aux Animals, aux Yardbirds, puis à Van Morrison et à Canned Heat, enfin aux Rolling Stones et à Eric Clapton. Honoré par tous, influence majeure d’innombrables guitaristes, John Lee Hooker doit absolument figurer dans votre discothèque, s’il n’y paraît pas déjà. Ou bien, c’est que le blues électrique ne vous intéresse pas ! Hou ! La honte !

28) Johnny Guitar Watson
Ceux qui croiraient, aux innocents les mains pleines !, que Jimi Hendrix a tout inventé, jetez donc une oreille sur les innombrables participations de Johnny Guitar Watson et sur les quelques images disponibles ici ou là, et vous comprendrez que le génie révélé par Woodstock avait lui-même un maître. Un des premiers à faire de la guitare électrique un instrument à part entière grâce à un subtil mélange de blues et de funk, largement influencé par T-Bone Walker par ailleurs ; ce qui n’échappa pas à Frank Zappa ou à Little Richards qui l’embauchèrent à leurs côtés. On reconnaît à coup sûr sa couleur musicale étonnante, acquise grâce à un fin mélange de feedback et de réverbe (une vraie révolution à l’époque), un style qu’on retrouve dans les remarquables albums des années 1976/1980 et dont je ne saurais trop vous recommander l’écoute.

29) Lead Belly
Si Lead Belly n’est pas reconnu aujourd’hui comme une influence majeure du country blues de la Louisiane, c’est tout bêtement que nul n’a jamais vraiment réussi à comprendre, et à reprendre !, son style rythmique incroyable. Une technique de virtuose, et singulière donc, le plus souvent mise au service de la guitare acoustique 12-cordes. Un monument du blues, évidemment, qui devrait ravir tous les amateurs de roots pur jus ; s’accompagnant à la guitare, certes, mais aussi à la mandoline, à l’harmonica, au violon, à l’accordéon, ou plus simplement en claquant des mains et en battant des pieds, il a abordé tous les thèmes chers du genre : les femmes, l’alcool, le racisme, la taule (qu’il a d’ailleurs connue après avoir tué un pote lors d’une bagarre de pochetrons…) et certains autres, bien plus étranges, comme Franklin Roosevelt, Adolph Hitler ou le milliardaire Howard Hughes ! A noter que ses chansons ont été reprises par des artistes aussi divers que Abba, Pete Seeger, The Animal, Creedence, Nirvana, Led Zeppelin, Bryan Ferry, Rory Gallagher, les Doors, j’en passe et des plus prestigieux. C’est dire l’importance du bonhomme qu’il vous faut découvrir, illico presto.

30) Ry Cooder
Musicien inclassable, Ry Cooder a pu surprendre ses admirateurs par les tours et les détours qu’a empruntés sa magistrale carrière ; même s’il reste, aujourd’hui encore, connu et reconnu par son (rare !) talent à la guitare slide, notamment pour la musique du film « Paris, Texas ». Génie de la guitare mais aussi de nombreux autres instruments (banjo, sax…), il a su investir pratiquement tous les styles américains (gospel, blues, folk, calypso, tex-mex, hawaïen…) et rejoindre les groupes les plus improbables comme Taj Mahal, Captain Beefheart, Randy Newman, Dolly Parton, ou les Rolling Stones (ces derniers lui ayant proposé de les rejoindre définitivement en 1968 !). Difficile de cerner le personnage mais, pour le domaine qui nous intéresse, à savoir le blues et la guitare, sachez qu’il maîtrise le bottleneck comme personne et que son style n’est à nul autre comparable. Cela devrait suffire à exciter votre curiosité et à vous plonger dans son abondante discographie.

31) Lonnie Johnson
Si, dans les patronymes Johnson, c’est Robert qui emporte, de nos jours, la palme, il ne faudrait pas oublier les vrais pionniers du blues ; et Lonnie y conserve toute sa place (ainsi que son frère, James Steady Roll) puisqu’il est généralement considéré comme le premier guitariste de blues virtuose (les bluesmen du Delta du Mississippi utilisant généralement la guitare comme instrument d’accompagnement sans souci d’exploits techniques particuliers). Des lignes mélodiques, des accords fondamentaux qui sonnent et fleurent bon le terroir, bien que le blues urbain, le blues des grandes villes américaines, n’en soient pas absents (faut dire que, lors de la Grande Dépression, il vécut à Chicago). Dès les années 1920 et 1930, Lonnie Johnson montra une prolixité étonnante pour l’époque, avec des dizaines d’enregistrements qui seront rejoints, après une traversée du désert, dans les années 1960, par de somptueux albums tout aussi bluesy même si l’empreinte du jazz (il a joué avec Louis Armstrong et Duke Ellington !) reste présente. Lonnie Johnson est mort en 1970 des suites d’un accident de voiture au Canada.

32) Robert Cray
Si le « cool blues » existait, Robert Cray en serait le maître incontesté ! Un jeu mélodique en diable, une technique toute en souplesse, un son net et clair (typique Fender !) qui n’interdit  pas le vrai feeling du blues bien qu’il ait arpenté toutes les allées de la musique rock, pop, jazz, et autre rhythm n’ blues… En 21 ans de carrière, le Robert Cray Band a collectionné pas moins de six nominations et trois prix aux Grammy Awards, récompensant ainsi des albums riches en influences et des scènes prestigieuses en compagnie de John Lee Hooker, Willie Dixon, Muddy Water, Albert Collins, Keith Richards, Eric Clapton pour n’en citer que quelques-uns. Au passage, sachez que Robert Cray chante également et que sa voix est à l’image du personnage : cool, présente, inspirée.

33) Bo Diddley
L’homme à la guitare rectangulaire (et je ne vous parle pas du modèle recouvert de fourrure) a singulièrement marqué les premières années du rock grâce à son style unique qui synthétise à la perfection ce que le blues chicagoan des années 1950 a produit de mieux. A tel point qu’on retrouve son influence davantage dans le rock and roll (les fameux riffs de Keith Richards en sont la plus brillante démonstration !) que dans le blues proprement dit. Particulièrement remarquables, ses rythmes façon shuffle, ses solos rythmés en diable, sa voix chaude et profonde, qu’on retrouve sur les albums de sa période Chess. Pour l’anecdote, il s’appelle Bob Diddley comme moi Marguerite de Valois, son surnom étant la traduction anglaise d’un instrument de musique africain à corde unique (un diddley bow) ; en fait, il est né Otha Ellas Bates… En attendant, impossible de citer ici toutes ses créations et participations, sans parler des enregistrements et autres concerts. Sachez seulement qu’ils sont suffisamment prestigieux pour lui avoir apporté une étoile sur le trottoir de Hollywood et son inscription au Rock and Roll Hall of Fame ! Ce qu’on appelle un « incontournable » en langage bobo !

34) Magic Sam
De son vrai nom Sam Maghett, Magic Sam est né dans le Delta du Mississippi mais déménagea, adolescent, à Chicago ; ce qui lui apporta une double culture du blues, rural et urbain, dont il sera l’un des plus étonnants représentants. Et dont la carrière aurait parcouru un long chemin si une crise cardiaque ne l’avait emporté à l’âge de 32 ans. Un vrai rebelle, celui-là, quand il refusa de suivre Otis Rush et Magic Slim chez Slim Records (la grande maison de disques du moment), quand il déserta l’armée et se retrouva en taule, quand il adapta à sa façon, magistrale, Every Night About This Time de Fats Domino… En un mot comme un cent, pour vous donner une image, et quelle image !, de ce que la côte ouest des Etats-Unis a donné de meilleur, intéressez-vous quelques instants aux enregistrements de Magic Sam ; qui porte bien son sobriquet.

35) Mick Taylor
Plus connu sous le surnom du « Rolling Stone silencieux », Mick Taylor entama une carrière fulgurante en remplaçant au pied levé Eric Clapton, qui avait oublié la date du concert ( !)  au sein des Bluesbreakers (du génial John Mayall) pour les rejoindre définitivement quand Peter Green quitta la formation. Ce qui le conduisit à jouer, en studio, sur l’album « Let it Bleed » des Stones avant de les rejoindre définitivement lors du mythique concert à Central Park. Et même s’il sut influencer Keith Richards en lui inspirant le riff en open tuning de Honky Tonk Women (entre autres !), il quitta le groupe dès 1974 pour une carrière éclectique, certes, mais essentiellement tournée vers sa passion : le blues. A noter, à cet égard, sa participation à l’album en hommage à John Lee Hooker.

36) Robben Ford
Un des rares artistes qu’on peut légitimement qualifier de bluesman moderne, réussissant de façon magistrale une fusion de nombreux styles musicaux. Faut dire que son parcours est exceptionnel avec, notamment, une aventure fructueuse en compagnie de Tom Scott, le saxophoniste, qui l’appela à ses côtés, puis de nombreuses participations auprès d’artistes aussi divers que variés (Miles Davis, Joni Mitchell, George Harrison pour n’en citer que quelques-uns). Robben Ford, c’est un toucher inimitable, un jeu empreint de l’esprit du blues bien sûr, mais aussi de la soul et du rhythm n’ blues. S’il s’avère une vraie star du genre aux Etats-Unis, les Européens le boudent quelque peu en dépit d’albums solos récents absolument incomparables (« Blue Moon », « Keep on Running » ou, en 2007, « Truth »).

37) Johnny Winter
Evidemment, les p’tits jeunots ne connaissent pas forcément  Johnny Winter, le maître du blues puissant et ravageur des années 1960. D’autant qu’il eut le mauvais goût de tendre peu à peu vers le rock, ce qui ne lui réussît pas vraiment, des problèmes majeurs de drogues n’arrangeant pas l’histoire par ailleurs. Nonobstant cela, Winter replonge dans ce qu’il sait faire le mieux en 1977 avec l’album « Nothing but the Blues » en compagnie des musiciens de Muddy Waters puis, en 1994, avec « Guitar Slinger », qui démontrent, si besoin en était, qu’il demeure le maître du genre. Avec ses influences marquées par le blues texan et du Mississippi, la musique de Johnny Winter constitue sans conteste ce que le blues blanc a produit de meilleur ; d’autant plus blanc, d’ailleurs, qu’il est albinos. Johnny Winter nous a quittés le 16 juillet 2014. RIP.

38) Billy Gibbons
Le monde occidental s’éveille au rock sudiste au début des années 1970 quand le groupe ZZ Top fit un carton, planétaire !, avec leur troisième album « Tres Hombres ». Pur produit de ce que le blues texan a engendré de mieux, Billy Gibbons, sous ses dehors de farfelu obsédé par les bagnoles et les gonzesses, façon camionneur, est un guitariste immensément doué. Jimi Hendrix ne s’y est pas trompé puisque, lors d’une rencontre, il lui offrit l’une de ses guitares préférées, en l’occurrence une Stratocaster rose. Evidemment, à première écoute, on pourrait croire que ce rock boogie (ou ce boogie rock ?) n’a pas grand-chose à voir avec le blues. Ne vous y trompez pas et écoutez attentivement les lignes de solo de Gibbons ; c’est lent, ça se répand rarement dans les cases aiguës, mais toute l’histoire du blues vibre dans ces quelques notes. Que dire de plus ? Travaillez chacune de ses interventions et vous comprendrez qu’entre l’esbroufe et le vrai boulot de fond, il existe un monde : le pur esprit du blues texan.

39) Otis Grand
Comme quoi on peut être considéré comme l’un des meilleurs bluesmen vivants du blues et être né en Europe (en Grande-Bretagne) ! Faut dire que c’est une obsession, chez Otis Grand ; comme il le dit lui-même : « Depuis l’âge de treize ans, je n’ai jamais joué que du blues, ni même essayé quoi que ce soit d’autre d’ailleurs, et je n’écoute que du blues ! » A 19 ans, il part terminer ses études en Californie et écume les salles locales, se régalant au passage de ceux qui deviendront ses maîtres : BB King, Albert King, Buddy Guy, Junior Wells… Son truc ? Transmettre son amour du blues au monde entier. Ce qui lui impose des tournées interminables sur tous les continents avec toujours le même plaisir communicatif ; et notamment en France où il vécut plus de cinq ans. Bref, je vous la fais courte : ce n’est pas une star mais la démonstration vivante que le blues ne se joue pas, il se vit. Si vous disposez d’internet, sachez que d’innombrables vidéos circulent sur la Toile ; qui vous permettront de comprendre pourquoi Otis est Grand (on n’a jamais dû lui faire, celle-là !).

40) Jimmy Vaughan
Frère aîné de Stevie Ray, Jimmy Vaughan se plonge, dès son plus jeune âge, dans le blues, écoutant la radio jour et nuit pour en répliquer les lignes sur sa guitare, offerte à l’âge de 13 ans, par un ami de la famille quand une blessure au football l’immobilisa quelque temps. Il joua dans divers groupes régionaux (il habitait au Texas, près de Dallas) avec, en titre de gloire, la première partie d’un concert de Jimi Hendrix. Influencé par Muddy Waters et Freddie King, il tenta de retrouver l’esprit des saxophonistes à la guitare ; ce qui lui permit d’acquérir un style pour le moins singulier. Au milieu des années 70, son groupe The Fabulous Thinderbird, produisit pas moins de 8 albums jusqu’à ce que Jimmy se lance dans une carrière solo. Evidemment, l’ombre de son petit frère, Stevie Ray, l’empêcha de connaître la légitimation de son immense talent ; jusqu’à la sortie de l’album « Family Style » produit par les deux frangins, et sorti peu de temps après la mort accidentelle de Stevie Ray en 1990. Ses participations à d’innombrables concerts vous donneront certainement l’occasion de goûter toute la puissance brute de ce guitariste blues rock.

41) Jonny Lang
Le genre de type à vous dégoûter de la guitare ! Il débute l’apprentissage de l’instrument à l’âge de 13 ans, et moins de trois ans plus tard, il a non seulement réalisé son premier album (qui fit un carton aux Etats-Unis), mais également partagé la scène avec les plus grands, de BB King à Aerosmith en passant par Jeff Beck et les Stones ! A 16 ans, il est à la tête du classement « Meilleur nouveau guitariste » du journal américain Guitar Magazine ! Il est nommé aux Grammy en 1999 et, cinq ans plus tard, il est invité par Eric Clapton himself au Crossroads Guitar Festival ! Un vrai conte de fées pour ce guitariste génial, inséparable de sa Telecaster Thinline Custom Shop, qui sait par ailleurs se montrer un chanteur hors pair. Buddy Guy a dit de lui : « Il paraît que le whisky se bonifie avec le temps, comme se doivent (et boivent ?) les bluesmen ! Eh bien, ce n’est pas vrai pour Jonny Lang… » Comme quoi, on peut naître au fin fond du Dakota, posséder une toute petite expérience, et en remontrer à plus d’une vieille barbe… Avis aux amateurs ! En attendant, jetez un œil sur ses vidéos de concert, c’est là où son incroyable style s’exprime le mieux.

42) Jeff Healey
On ne peut pas dire que Jeff Healey fut béni des Dieux car, abandonné à la naissance, il fut adopté par un couple canadien qui se rendit compte qu’il était atteint, à l’âge d’un an, d’une forme rarissime de cancer de la rétine qui le rendit aveugle. Et pourtant, dès l’enfance, il montra une prédisposition à la musique étonnante, adoptant une technique de jeu singulière, sa guitare posée à plat sur les genoux. Tout au long de sa carrière, il jongla avec les styles, passant du blues au rock, du rock au jazz ; mais toujours avec un parfum blues inimitable. Collectionneur de disques, il a su s’imprégner de toutes les musiques, ce qui transparaît dans son jeu singulier. A noter ses rencontres musicales avec Albert Collins, Stevie Ray Vaughan, BB King, Mark Knopfler, George Harrison, parmi des centaines d’autres, ainsi que la musique du film « Road House en 1989 » ; cela pour démontrer, si besoin était, l’éclectisme du personnage. Jeff Healey est mort le 2 mars 2008 à Toronto, quelques semaines avant la sortie de son dernier album, « Mess of Blues ». Tout un programme…

43) Sean Chambers
Vous aimez Stevie Ray Vaughan ou Johnny Winter ? Vous adorerez Sean Chambers ! Mais, attention !, ce n’est pas une pâle copie dont il s’agit mais d’un vrai bluesman texan (bien qu’il vienne de Floride). Gamin, il se plongea à corps perdu dans l’intégralité du répertoire de Jimi Hendrix et il lui en restera un toucher, une énergie à la guitare, qui n’est pas sans rappeler le maître. Mais il fut tout autant influencé par BB King, Clapton, Jeff Beck, Billy Gibbons ; ce qui en dit long sur l’étendue de son répertoire. Son heure de gloire, il la connaîtra lors de la tournée mondiale de Hubert Sumlin, avant de partager la scène avec d’innombrables stars du blues dont, notamment : BB King, Buddy Guy, Greg Allman, Lynyrd Skynyrd, Robin Trower, Little Feat, Otis Rush, Kenny Wayne Shepherd, Charlie Musselwhite, Jeff Healey, Rick Derringer, James Cotton, Bo Diddley, Robert Cray… Ouf ! En clair, du blues lourd et enlevé.

44) Bonnie Raitt
Eh oui, il y a des femmes dans le blues (pourtant, il me semblait qu’on avait dit « Pas de gonzesse dans la musique ! lol…). Et Bonnie Raitt a de quoi en étonner plus d’un avec, notamment, une technique de slide absolument incomparable. Faut dire que son papy était un adepte de la guitare hawaiienne et qu’il lui en a enseigné les rudiments dès l’âge de 10 ans. Une voix extraordinaire, rarissime dans le blues, évidemment influencée par son chanteur de père et sa pianiste (et chanteuse) de mère ! Elevée dans la plus pure tradition Quaker, Bonnie Raitt se mit à la guitare dès l’âge de huit ans, poursuivit de brillantes études sur la sociologie africaine, et se montra une ardente militante des droits de l’Homme (et, accessoirement, de la femme). Ses premières influences bluesy furent Mississippi Fred McDowell, Sippie Wallace, Son House, Muddy Waters, John Lee Hooker… Aujourd’hui, elle est devenue, aux Etats-Unis, une véritable institution, et ses duos, participations, albums personnels, sont si nombreux qu’il est impossible d’en dresser une liste exhaustive. Ne vous y trompez pas, Bonnie Raitt est une vraie blueswoman, avec tout ce que cela implique de respect de la musique originelle, de dope et d’alcool, sans compter les expériences de vie difficiles. Elle doit absolument compter dans votre discothèque bluesy !

45) Lightnin’ Hopkins
S’il en était un seul, Lightnin’ Hopkins serait la démonstration vivante que le blues n’est pas affaire de techniques guitaristiques mais d’esprit. A l’image de John Lee Hooker, il reste une référence pour tous les bluesmen du monde entier. Pur produit du blues texan, proposant une musique essentiellement réservée à la communauté noire américaine, Hopkins est un des tout premiers à jouer sur électrique, adepte par ailleurs du walking blues et du jeu très marqué. Ce qui ne l’empêcha pas de connaître un succès fulgurant, quelques années plus tard, lors du revival folk et blues des sixties, se mettant alors à l’acoustique avec un résultat pour le moins épatant qui lui permit, enfin, d’accéder à la scène blanche. Mort en 1982 au Texas, Hopkins laisse derrière lui un nombre incalculable d’enregistrements (plus de 80 !) dans lesquels il n’est pas toujours facile de trier le grain de l’ivraie ; mais la quête vaut le détour. Pour un aperçu de son immense talent, je vous recommande l’album de compilations « Mojo Hand » qui retrace la plus grande partie de sa carrière.

46) Joe Louis Walker
Bien qu’il soit né à San Francisco, Joe Louis Walker puise ses racines dans l’Arkansas de sa famille où il est initié très jeune au blues du Delta et chicagoan certes, mais aussi à la soul et au gospel ; ce qui en fait un guitariste éclectique même s’il n’a jamais pu vraiment s’éloigner du blues originel. Grand camarade de Mike Bloomfield, il participa à la création d’un courant artistique, le blues contemporain. A noter, son album « Great Guitars », sorti en 1997, où il réunit un nombre invraisemblable d’invités, et pas des moindres puisqu’on y retrouve, notamment, Bonnie Raitt, Buddy Guy, Taj Mahal, Clarence Gatemouth Brown, Otis Rush, Scotty Moore, Robert Lockwood Jr, Matt Guitar Murphy, Steve Cropper, Little Charlie Baty… Remarquables également ses innombrables apparitions sur différents enregistrements d’artistes où sa connaissance encyclopédique de l’histoire du blues apporte un cachet singulier.

47) Kenny Wayne Shepherd
Prodige de la guitare, Kenny Wayne Shepherd débuta à l’âge de sept ans, réalisa son premier album dix ans plus tard, et devint une référence guitaristique alors qu’il fêtait son vingt-deuxième anniversaire. Largement inspiré du blues du Delta, de Chicago ou du Texas, son premier CD, « Ledbetter Heights » l’imposa sur la scène américaine. Il joua en première partie, ou partagea la scène avec Aerosmith, Bob Dylan, Eagles, les Rolling Stones, Van Halen, B.B. King, Les Paul, Peter Frampton, Steve Miller, Steve Lukather, Derek Trucks et Herbie Hancock… Ce qui en dit long sur l’ouverture d’esprit du musicien, même si ses plus grandes réussites restent profondément enracinées dans le blues. Ses albums suivants connurent le même succès commercial même quand il arpenta les allées du pur rock n’ roll. Ses références ultimes ? Charlie Patton, Blind Lemon Jefferson, Robert Johnson… Question matos, il reste fidèle à la Strat, aux amplis Vibroverb, aux pédales TS-9 et TS-808 Ibanez, couplées à une wah-wah et à un délai Line 6 notamment.

48) Kevin Moore
Plus connu sous son nom de scène, Keb Mo’, ce guitariste de génie a su construire une passerelle entre le pur blues du Delta et le XXIe siècle. Avec sa technique main droite, façon picking, sa voix éraillée et chaleureuse en diable, il a su mêler le meilleur du country blues, du gospel, voire de la pop ! En fait, si vous fréquentez déjà Robert Johnson, vous serez en territoire connu avec cet artiste incomparable ; même si ses influences façon Muddy Waters ou Taj Mahal restent indiscutables. A noter qu’il a obtenu trois Grammy Awards dans la catégorie « Meilleur album de blues contemporain ». Je vous recommande, au passage, de glisser un œil, et une oreille attentive, au film de « Martin Scorsese Presents » où on retrouve ce qu’il existe de mieux question blues moderne ; notamment les productions créées à l’occasion de l’année du blues, en 2003, aux Etats-Unis.

49) Walter Trout
En voilà un qui risque d’en surprendre plus d’un. Surtout quand on connaît ses albums solos, à l’ambiance plutôt rock… Pourtant, Walter Trout a baigné, est imprégné du blues le plus roots. D’abord, par ses influences initiatiques dont BB King reste le père spirituel ; mais aussi par son parcours auprès de John Mayall et ses fameux Bluesbreakers, excusez du peu. Pourtant, il se réclame de toutes les musiques,  pour peu qu’elles soient populaires, au sens noble du terme bien sûr. Pour vous en rendre compte, jetez une oreille attentive à son album « Livin’ Every Day » ! Par ailleurs, sachez qu’il fut élu, par la BBC, sixième meilleur guitariste mondial ! Du blues électrique dense et profond comme on l’aime. Autrement dit, ça joue… Au passage, glissons un cocorico tricolore en signalant que Trout joue sur une marque française, les guitares Vigier.

50) Carvin Jones
Natif de Phoenix (Arizona), Carvin Jones reçut l’adoubement ultime de la part d’Eric Clapton qui le considère comme l’un des plus prometteurs bluesmen de sa génération. Ce qui, connaissant la faible propension de Slowhand à complimenter qui que ce soit, n’est pas une mince louange ! Et si les performances enregistrées de Carvin Jones ne sont pas toujours à la hauteur de sa réputation, c’est sur scène qu’il bluffe son monde. En clair, si vous souhaitez retrouver le véritable esprit de Hendrix, de Stevie Ray Vaughan, du Cream des plus belles années avec un soupçon de la bande de King (BB, Freddie et Albert !), ne ratez sous aucun prétexte le prochain show de Carvin Jones, vous ne le regretterez pas (et, accessoirement, vous me remercierez d’avoir attiré votre attention sur le phénomène).


Les bâtiments, l’habitat, la maison, le mobilier, la ville, les métiers de l’immobilier vous intéressent ? Retrouvez,  du même auteur, l’aventure historique et étymologique du vocabulaire de la maison et de l’immobilier dans L’Abécédaire de l’habitat.